Journal De Bruxelles - Euclid, le "détective de l'Univers sombre", aidé par l'IA et des humains

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Euclid, le "détective de l'Univers sombre", aidé par l'IA et des humains
Euclid, le "détective de l'Univers sombre", aidé par l'IA et des humains / Photo: Handout - ESA/Euclid/Euclid Consortium/NASA/AFP/Archives

Euclid, le "détective de l'Univers sombre", aidé par l'IA et des humains

Le télescope spatial européen Euclid, véritable "détective de l'Univers sombre" aidé par l'IA et des humains, a livré mercredi les premières données d'une mission qui doit aider à percer le mystère de la matière noire et de l'énergie sombre.

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En orbite à 1,5 million de kilomètres, Euclid avait livré dès 2023 de premières images du cosmos, puis l'an dernier une vue de cent millions d'étoiles et de galaxies.

Elle ambitionne de dresser en six ans une carte en 3D d'1,5 milliard de galaxies sur une portion d'un tiers de la voûte céleste.

La livraison de ce mercredi, baptisée "Q1", représente "une nouvelle étape pour notre détective de l'Univers sombre", a dit Carole Mundell, directrice de la science à l'Agence spatiale européenne (ESA).

Avec 27 études scientifiques publiées à partir de l'observation de moins de 0,5% du ciel que va scruter Euclid sur la durée de sa mission.

Et qui fournissent un premier regard sur la "toile cosmique", souligne Valeria Pettorino, scientifique du projet pour l'ESA. Comme celle d'une araignée, elle illustre "le fait que les galaxies forment des espaces vides, et se rassemblent en filaments, en groupes de galaxies".

Un assemblage que la seule matière visible ne peut expliquer, et dont l'équilibre tient à l'existence de la matière noire et de l'énergie sombre, deux éléments théoriques composant 95% de l'Univers. Responsables pour le premier de la cohésion des amas de galaxies, et pour le deuxième de l'accélération de l'expansion du cosmos.

Au bout du compte, Euclid doit permettre, selon Mme Mundell, de "tester les lois de la gravité", et avec elles la théorie générale de la gravité d'Einstein.

D'ici là, le premier défi du consortium Euclid, qui regroupe plus de 2.000 chercheurs de quinze pays européens, des Etats-Unis, du Canada et du Japon, sera de rendre exploitable l'avalanche de données qui s'annonce.

A titre d'exemple, la semaine d'observation du télescope effectuée avec Q1 représente l'équivalent de 200 jours de vidéo haute définition.

Son exploitation "permet d'abord de voir si la machinerie marche", et particulièrement celle des "pipelines de réduction de données", explique Francis Bernardeau, adjoint au responsable scientifique du consortium et chercheur à l'Institut de physique théorique du Commissariat à l'énergie atomique (CEA).

Un sujet qui "ne fait pas forcément les gros titres", mais auquel sont consacrées sept des études publiées mercredi. Cette "réduction" permet à l'aide d'algorithmes de "passer des données brutes, avec leurs défauts inhérents", à des images autorisant des analyses scientifiques reproductibles.

- "Champs profonds" -

Pour Q1, ce travail de calibration s'appuie sur l'observation de trois "champs profonds", des zones du ciel avec un échantillon de 26 millions de galaxies dont les plus lointaines se trouvent à 10,5 milliards années-lumière. Un voyage dans le temps, car plus on regarde loin, plus on remonte vers les origines de l'Univers et ses 13,8 milliards d'années.

Ces champs seront visités chacun 40 fois au fil des six ans de la mission afin d'éviter les erreurs d'interprétation des observations, explique Jean-Charles Cuillandre, astronome au CEA. Et ainsi "étalonner précisément le télescope pour la science qui touche à l'énergie sombre et à la matière noire".

A ce cœur de mission, s'ajoute le recensement de populations d'objets comme les galaxies, quasars ou lentilles gravitationnelles.

Ces dernières apparaissent quand une masse suffisamment imposante, comme celle d'une galaxie, déforme la lumière provenant d'une galaxie plus lointaine située derrière, dans la ligne de visée.

En une semaine d'observation, Euclid en a détecté environ 500, "bien plus qu'attendu" explique Mike Walsmley, chercheur à l'Université de Toronto.

Pour recenser ces raretés parmi les millions de galaxies observées, le consortium a recours à des programmes d'intelligence artificielle (IA) aidés par des humains.

Des modèles d'IA ont sélectionné de potentielles lentilles gravitationnelles avant une vérification par des humains. Cette science participative avec des milliers de volontaires a aussi fonctionné en sens inverse.

Des fans de l'espace ont contribué à une classification des formes de galaxies, qui a "servi à entraîner des modèles pour reproduire" ce classement, détaille M. Walsmley.

Après ce recensement, le grand œuvre des chercheurs d'Euclid va être la constitution du catalogue de données dont la première édition est attendue pour 2026.

H.Dierckx--JdB