JO-2022: de la montagne à l'état pur, le freeride trace une ligne vers l'olympisme
"Rider" dans la poudreuse loin des circuits balisés pour créer sa ligne dans une descente spectaculaire de la montagne: tel est l'esprit du freeride, une discipline qui s'organise depuis 25 ans pour aujourd'hui proposer un circuit professionnel et demain peut-être, devenir olympique.
Skieurs et snowboardeurs sont de plus en plus nombreux à sortir du cadre et se lancer dans une pratique hors-piste, celle du freeride, qui consiste à être "en osmose avec la montagne" --selon les aficionados-- en proposant des figures aériennes et acrobatiques tout en glissant sur des pentes raides, portés par un vent de liberté.
A ne pas confondre avec le ski freestyle et le snowboard, entrés aux JO respectivement en 1992 et 1998, pour compter en 2022 à Pékin un total de 24 épreuves, comme slopestyle, half-pipe ou big air.
"Dans une compétition de freeride, les modules ne sont pas construits, tout est naturel. A partir du moment où on est en dehors des pistes balisées, c'est du freeride. Le freestyle se passe sur des pistes balisées qui font que les atterrissages et les décollages sont parfaitement lissés, ça s'apparente plus à de la gym", explique à l'AFP la reine du ski freeride, la Suissesse Elisabeth Gerritzen (championne du monde en 2021 et 2015).
- Aux JO en 2026 ou 2030 ? -
Le freeride, en plein boom, ne date pas d'hier. Il y a une centaine d'années, il s'agissait de la pratique originelle. En 1996 a eu lieu une toute première compétition sur un site d'exception connu comme la Mecque de la pratique, Verbier (Suisse). En 2008 le premier circuit mondial était proposé, le Freeride World Tour (FWT), qui fête cette année sa quinzième édition. La discipline en revanche n'a pas encore de fédération internationale.
"Le freeride est une langue universelle, du Japon au Chili via l'Islande. Tout de suite on parle la même langue, on a quelque chose en commun qui est fort. Il y a quelque chose de magique", souligne à l'AFP le directeur du FWT, Nicolas Hale Woods, qui évoque "des discussions dans l'optique d'être aux Jeux olympiques".
"On pourrait devenir la fédération internationale ou intégrer une fédération existante. Je suis persuadé que le freeride sera aux Jeux soit en 2026, soit en 2030."
Selon le fondateur du circuit, le FWT compte 5.600 licenciés de 35 nationalités différentes et organise des événements dans 22 pays. "L'audience est jeune, occidentale et moins occidentale, et l'une des priorités du CIO est d'être en phase avec les jeunes", assure Hale-Woods.
- "Magique" ou "horrible" -
Du côté des riders, les avis sont partagés.
"Beaucoup de monde serait ravi que le freeride entre aux Jeux olympiques. Aux Jeux, il y a plein de disciplines nouvelles comme le skate, le surf, ça fait du bien. Le surf à Teahupoo (Tahiti/JO-2024), c'est magique. Alors vu comme ça, on pourrait se projeter sur les Jeux si on nous amène sur des endroits intéressants mais j'ai peur que ça tue l'esprit famille", fait valoir à l'AFP le snowboardeur Camille Armand.
Même si la réalité environnementale fait qu'aujourd'hui les compétitions de freeride ne sont plus exclusivement sur de la poudreuse --l'essence de la pratique- il n'est pas concevable pour la communauté de devoir s'exprimer sur de la neige artificielle, comme cela sera le cas à Pékin.
"Etre aux Jeux olympiques, dans l'absolu je ne vois pas pourquoi ce ne serait pas possible", relève Elisabeth Gerritzen. "Par contre je vois une réelle problématique organisationnelle. A Pékin, toutes les disciplines sont sur de la neige artificielle à 100%. C'est hallucinant d'organiser des JO d'hiver dans un lieu où il ne neige pas. J’espère qu'on s'opposerait à ça. Inventer une montagne là il n'y en a pas, ce serait horrible."
Le skieur Léo Slemett, champion du monde en 2017, estime que le freeride est un sport déjà suffisamment riche dans ce qu'il propose pour ne pas avoir à courir après un label olympique.
"Je suis un peu contre les grandes mannes financières, ça n'a jamais fait partie d’un objectif. C'est chouette encore la liberté qu'on peut avoir au travers de notre discipline", défend-il.
Y.Simon--JdB