Le Parlement boucle un long marathon budgétaire en adoptant le budget de la Sécu
Plus de quatre mois après leur présentation, les budgets pour 2025 sont enfin adoptés au Parlement: le Sénat a mis fin à une interminable séquence budgétaire en approuvant définitivement le projet de budget de la Sécurité sociale. Une étape importante de franchie pour le gouvernement Bayrou.
Fragilisé par l'affaire des violences sexuelles perpétrées dans l'établissement catholique de Notre-Dame-de-Bétharram, François Bayrou peut en revanche souffler sur le volet budgétaire.
Un vote sans suspense du Sénat, qui soutient le Premier ministre, a en effet acté l'adoption définitive du projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) pour 2025, approuvé dans les mêmes termes que l'Assemblée nationale la semaine dernière.
Déposé le 10 octobre 2024 au Parlement, à l'origine de la chute de Michel Barnier en décembre et truffé de mesures irritantes sur les retraites ou les exonérations de cotisations patronales, ce texte a été voté lundi par 225 sénateurs contre 104, l'ensemble de la gauche s'y opposant.
Mercredi, l'Assemblée l'avait adopté via le rejet d'une troisième motion de censure visant le Premier ministre, la quatrième sur les textes budgétaires et la cinquième en tout pour François Bayrou.
Selon la ministre des Comptes publics Amélie de Montchalin, ce vote permettra au pays de "sortir le plus vite possible de cette période d'attente et d'instabilité", quelques jours après l'adoption définitive du budget de l'État.
"Il est évident que ce texte n'est pas à la hauteur des enjeux", a noté la rapporteure centriste au Sénat Elisabeth Doineau. Mais "il est temps que la France se dote enfin d'un projet de loi de financement de la Sécurité sociale", a-t-elle reconnu, appelant à faire "davantage pour réduire le déficit dans les textes à venir".
- Déficit à 22,1 milliards -
Passé à la moulinette de la censure et des concessions accordées aux oppositions comme à la majorité, le PLFSS prévoit une hausse des dépenses d'Assurance maladie de 3,4%, contre 2,8% initialement prévu, notamment parce que l'exécutif a rallongé d'un milliard d'euros l'enveloppe de l'hôpital.
Le déficit devrait lui s'élever à 22,1 milliards d'euros, au lieu de 16 milliards, et des sources parlementaires s'inquiètent d'une facture réelle encore nettement en hausse d'ici la fin de l'année.
"Nous avons pris en compte les priorités exprimées pour proposer un texte probablement imparfait et j'en ai conscience. Mais un texte qui a pour objectif d'essayer de nous réunir et de nous rassembler", a estimé la ministre du Travail et de la Santé, Catherine Vautrin.
Le gouvernement a dû renoncer à une hausse des tickets modérateurs (reste à charge du patient après le remboursement de l'assurance maladie), accepter de revoir à la baisse les efforts demandés aux entreprises concernant les exonérations de cotisations sociales, et faire le deuil de la désindexation des retraites sur l'inflation.
Insuffisant pour satisfaire totalement les socialistes, même s'ils n'ont pas voté la censure à l'Assemblée.
"La France a bien besoin d'un budget, mais nous aurions préféré une version plus équitable", a regrette la sénatrice PS Annie Le Houérou, qui a fustigé un texte "qui ne donne aucune perspective de pérennité à notre système de Sécurité sociale".
Si le texte définitivement adopté conserve de nombreux apports du Sénat, seule chambre à l'avoir examiné en entier à l'automne, l'idée des sénateurs d'instaurer sept heures de travail annuelles supplémentaires non rémunérées n'a pas non plus fait florès. Mais celle d'instaurer une "taxe lapin", amende visant les patients s'ils n'honorent pas leurs rendez-vous, est bien conservée, avec des modalités renvoyées à un futur décret.
Si la droite, majoritaire au Sénat, a joué le jeu lundi d'une adoption sans modification, elle a aussi appelé à des réformes structurelles. "Il est fondamental d'enrayer, dès le prochain PLFSS, l'aggravation du déficit de la Sécurité sociale afin de ne pas mettre gravement en péril notre système global de protection sociale", a lancé le président LR de la commission des Affaires sociales Philippe Mouiller.
R.Cornelis--JdB