

Le Canada vote après une campagne à l'ombre de Trump
Le Canada vote lundi pour choisir le Premier ministre chargé de faire face à une crise sans précédent et de négocier avec Donald Trump dont la guerre commerciale et les menaces d'annexion ont bouleversé le pays.
C'est le nom qui ne figure sur aucun bulletin de vote canadien mais bien celui qui est dans toutes les têtes: le président américain Donald Trump a hanté la campagne des législatives anticipées canadiennes.
La question qui agite les électeurs depuis des semaines est donc: qui est le plus à même de lui faire face? Qui défendra le mieux les intérêts canadiens dans ce moment charnière pour le pays?
Deux candidats devancent les autres dans les intentions de vote, avec une longueur d'avance pour le premier: le candidat libéral et actuel Premier ministre Mark Carney et le chef des conservateurs Pierre Poilievre.
La campagne s'est déroulée dans un climat tendu, et a été bouleversée samedi par une attaque à la voiture-bélier à Vancouver, par un homme souffrant de problèmes de santé mentale, selon la police, qui a tué onze personnes et en a blessé des dizaines d'autres. Le suspect, un habitant de Vancouver de 30 ans, a été inculpé pour huit chefs de meurtre.
Dans cet immense pays, qui s'étale sur six fuseaux horaires, les premiers bureaux de vote ouvrent à 8H30 locales (11H00 GMT) dans les provinces atlantiques. Au total, près de 29 millions d'électeurs sont appelés à voter mais plus de sept d'entre eux ont déjà fait leur choix par anticipation, une participation record.
Les résultats devraient être connus quelques heures après la clôture du vote, à 19H00 côté Pacifique (2H00 GMT mardi).
- Incarner le changement -
Le Canada est confronté depuis des mois à une crise politique aggravée par le retour de Donald Trump à la Maison blanche et son offensive sans précédent contre son voisin du nord, grand partenaire commercial et allié de longue date.
Entré dans l'arène politique, il y a seulement un mois, Mark Carney, ancien banquier et ex-gouverneur de la banque du Canada et de Grande-Bretagne, promet pour y faire face de "réinventer" l'économie canadienne.
Depuis qu'il a remplacé Justin Trudeau au poste de Premier ministre, il s'efforce de convaincre les électeurs que son parcours fait de lui le candidat idéal pour cette crise historique que vit le pays avec des droits de douane qui affectent déjà des secteurs clés comme l'automobile et l'acier.
Les États-Unis de Donald Trump "veulent nous briser pour pouvoir nous posséder", a-t-il répété à plusieurs reprises pendant la campagne.
"J'ai déjà géré des budgets, des économies et des crises. L'heure est à l'expérience, pas à l'expérimentation", a lancé cet anglophone de 60 ans, né dans l'ouest de ce pays bilingue et dont le français est limité.
En face, le chef conservateur, homme politique de carrière de 45 ans, veut que le pays, 9e puissance économique mondiale, tourne le dos aux libéraux. Il promet d'incarner un "changement" en réduisant les impôts, les dépenses publiques et en s'attaquant à l'"idéologie woke".
Des mesures qui le plaçaient largement en tête des sondages, il y a quelques mois encore, avant que Donald Trump ne vienne tout bousculer.
"Nous ne pouvons pas supporter quatre années supplémentaires comme cela", a-t-il estimé lors des derniers jours de campagne parlant d'une trajectoire menant à plus "de désespoir, plus d'inflation".
- "Bon CV" -
"Cette élection est extrêmement importante", estime Jeff Sims, scientifique qui vit au Québec à Gatineau, ville proche de la capitale fédérale Ottawa.
"Je ne pense pas que nous ayons déjà subi une attaque contre notre souveraineté comme celle-ci auparavant", ajoute-t-il estimant que Mark Carney "a le bon CV" pour gérer la situation.
Mais dans le camp d'en face, les partisans de Pierre Poilievre rêvent de changement après dix années de gouvernement du libéral Justin Trudeau.
Selon les derniers sondages, les libéraux sont crédités de 42,8% des voix et les conservateurs de 38,8%. En termes de projections de sièges, les libéraux pourraient être en mesure d'obtenir autour de 200 députés pour une majorité placée à 172.
Les autres partis - le Nouveau parti démocratique (gauche), le Bloc québécois (indépendantiste) et les Verts - pourraient subir de lourdes défaites, victimes en partie du vote utile.
W.Dupont--JdB