Mozambique: Daniel Chapo, nouveau président qui doit éteindre la crise
Daniel Chapo, qui doit être investi mercredi à la tête du Mozambique à l'issue d'une élection vivement contestée, est un ancien gouverneur provincial sans expérience de l'Etat, qui va devoir éteindre la crise suscitée par l'opposition pour restaurer la stabilité.
A 48 ans, il reste largement inconnu dans le pays lusophone d'Afrique australe, où beaucoup ne l'ont découvert que lors de sa désignation surprise en mai par le parti historique au pouvoir.
Contesté par des mois de manifestations violentes qui ont fait 300 morts selon une ONG locale et perturbé l'économie du pays pauvre et fortement inégalitaire, il n'était pas non plus le candidat préféré du président sortant Filipe Nyusi, 65 ans, qui a atteint la limite de deux mandats.
La passation de pouvoir signe la continuité du parti Frelimo, aux origines marxistes, à la tête du pays depuis son indépendance en 1975, soit un demi-siècle sans alternance politique.
Juste avant Noël, la plus haute cour du pays avait confirmé l'élection de Daniel Chapo avec 65,17% des voix, soit cinq points de moins que le résultat initialement annoncé par la commission électorale en octobre, en dépit des nombreuses irrégularités relevées par plusieurs missions d'observation internationales.
Il devient le premier président né après l'indépendance du Portugal et le premier à n'avoir pas été un combattant du Frelimo pendant la guerre civile (1975-1992), qui a fait un million de morts et hante encore les esprits.
Le principal opposant, Venancio Mondlane, crédité de seulement 24% des voix mais convaincu qu'il est le réel vainqueur du scrutin du 9 octobre, est rentré au Mozambique la semaine dernière.
Il a appelé à trois jours de manifestations, de lundi quand le Parlement a siégé pour la première fois, en l'absence d'une partie de l'opposition, jusqu'à l'investiture du président mercredi.
Daniel Chapo joue l'apaisement depuis le début des violences, répétant qu'il est prêt à parler avec "tout le monde". Les prochains jours et l'annonce de son gouvernement prévue cette semaine, permettront de mieux cerner sa stratégie pour restaurer le calme.
- "Influençable" -
Diplômé en droit, cet ex-professeur de sciences politiques et présentateur de radio a sillonné le pays en amont de son investiture.
Grand et costaud, Daniel Chapo dominait physiquement ses meetings de campagne où il a fait vœu de "travailler avec chaque couche de la société", faisant miroiter la construction d'écoles, d'hôpitaux et une économie plus robuste.
Il a promis aussi d'éradiquer les violences dans la province septentrionale du Cabo Delgado, cible d'attaques par des groupes jihadistes affiliés au groupe Etat Islamique depuis 2017.
Ce conflit, qui a fait plus d'un million de déplacés et près de 5.900 morts, contrarie les espoirs économiques liés aux gisements de gaz naturel dans l'océan Indien. Le géant français TotalEnergies, notamment, a gelé l'un de ses projets.
Daniel Chapo, qui a commencé sa carrière politique par des nominations du Frelimo, avait été désigné administrateur du district de Palma (nord-est) en 2015.
"À l'époque, des projets de gaz naturel étaient en cours de développement", souligne le chercheur mozambicain Borges Nhamirre. "Il a compris comment traiter avec les multinationales localement."
Gouverneur de la province centrale d'Inhambane depuis 2016, il avait été désigné en mai candidat à la présidentielle par le Frelimo, après des débats intenses du comité central et plusieurs votes successifs.
"Le Frelimo n'arrivait pas à se mettre d'accord, ils ont choisi Chapo pour pouvoir l'influencer. Il ne remet pas en cause les équilibres et sera très encadré", résume un expert qui souhaite conserver l'anonymat.
Pour Borges Nhamirre, il a été choisi in fine parce que "les différentes factions du Frelimo ont compris qu'il serait le plus facile à influencer", notamment sur la désignation de ministères ou de postes-clefs au sein des forces de sécurité.
R.Vandevelde--JdB