Câbles rompus en Baltique: le parquet suédois n'a pas été autorisé à mener son enquête à bord du Yi Peng 3
Le procureur suédois n'a pas été autorisé par la Chine de mener son enquête à bord du cargo chinois suspecté d'être impliqué dans la rupture de deux câbles en mer Baltique, a affirmé lundi la ministre suédoise des Affaires étrangères.
Pékin a assuré de son côté être prêt à poursuivre la "coopération" sur le rôle de ce navire, qui a quitté samedi les eaux internationales du détroit de Kattegat entre la Suède et le Danemark, où il était immobilisé depuis le 19 novembre.
Les deux câbles de télécommunications ont été coupés les 17 et 18 novembre dans les eaux territoriales suédoises de la mer Baltique, et les soupçons se sont rapidement portés sur un navire battant pavillon chinois, le Yi Peng 3, qui se trouvait au-dessus de la zone au moment de l'incident, selon des sites internet de suivi des navires.
"Notre demande de permettre au procureur suédois et à la police (...) de prendre des mesures dans le cadre de l'enquête préliminaire à bord (du Yi Peng 3) reste inchangée", a écrit la ministre suédoise Maria Malmer Stenergard dans un message à l'AFP.
- "Evaluations techniques" -
Jeudi, la police suédoise ainsi que l'Autorité suédoise d'enquête sur les accidents (SHK) avaient été autorisées à bord du Yi Peng 3 pour assister en tant qu'"observateurs" à une inspection menée par des représentants des autorités chinoises.
La police suédoise avait précisé qu'aucune investigation ne serait conduite à bord et que ces opérations ne faisaient pas partie de l'enquête judiciaire suédoise.
"Dans le même temps, je constate que la Chine n'a pas répondu (favorablement) à notre demande d'autoriser le procureur à mener une enquête préliminaire à bord", a précisé Mme Stenergard.
Le procureur, Henrik Söderman, a confirmé lundi à l'AFP qu'aucune mesure dans le cadre de l'enquête judiciaire suédoise n'a pu être prise sur le navire, qu'il s'agisse d'interrogatoires des membres de l'équipage ou d'investigations techniques.
Mais l'Autorité suédoise d'enquête sur les accidents a, elle, pu, dans le strict cadre de l'enquête chinoise, mener ses propres investigations en parallèle.
"Par exemple, parler aux membres de l'équipage et réaliser des évaluations techniques", a souligné auprès de l'AFP le directeur général de SHK, John Ahlberk, sans préciser si des échanges ont eu lieu entre son autorité et le parquet suédois.
Pékin a confirmé que le navire avait quitté la zone.
"La société propriétaire du navire, après une évaluation complète et des consultations avec les parties concernées, a décidé de reprendre ses opérations", a dit lundi la porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères, Mao Ning, ajoutant que "la Chine a informé à l'avance les pays concernés".
- Communication et coopération -
Pékin entend "maintenir la communication et la coopération avec les pays concernés pour avancer dans le traitement de cet incident", a ajouté la porte-parole lors d'une conférence de presse régulière.
Des responsables européens ont exprimé leurs soupçons quant à un acte de sabotage en lien avec l'invasion de l'Ukraine par la Russie, des accusations qualifiées d'"absurdes" par le Kremlin.
Jeudi, les autorités suédoises, allemandes et finlandaises, accompagnées d'un observateur danois, ont été invitées à monter à bord du cargo pour une enquête conduite par la Chine.
"Je pars du principe que nous continuerons à avoir des discussions avec la Chine sur cette question, à différents niveaux, (pour que) la police et les procureurs bénéficient des conditions nécessaires pour enquêter sur ce qui s'est passé", a insisté Maria Malmer Stenergard dans son message à l'AFP.
Fin novembre, la Suède avait sollicité la coopération de la Chine pour cette enquête, tout en précisant, par la voix du Premier ministre Ulf Kristersson, qu'il n'y avait aucune "accusation" en cours.
Les incidents suspects se sont multipliés dans le pourtour de la mer Baltique et de la mer du Nord depuis l'invasion de l'Ukraine par la Russie en février 2022.
Ces actions, ciblant notamment les infrastructures énergétiques et de communication, s'inscrivent, selon experts et politiques, dans le contexte de la "guerre hybride" entre la Russie et les pays occidentaux, dans ce vaste espace bordé par plusieurs membres de l'Otan, où Moscou dispose également de points d'entrée.
En septembre 2022, une série d'explosions sous-marines avait endommagé les gazoducs Nord Stream, qui transportaient du gaz russe vers l'Europe. La cause de ces explosions reste à ce jour inexpliquée.
Un gazoduc sous-marin entre la Finlande et l'Estonie avait été mis hors service en octobre 2023 après avoir été endommagé par l'ancre d'un navire marchand chinois.
E.Janssens--JdB