La réforme de l'assurance chômage, bataille de la rentrée à l'Assemblée
Dans un climat déjà en ébullition, l'Assemblée nationale reprend ses travaux lundi par un projet de loi contesté qui amorce une nouvelle réforme de l'assurance chômage. Les macronistes, faute de majorité absolue, escomptent le soutien de la droite.
Avant ces discussions dans la soirée, les députés échangeront à partir de 16h00 sur la "guerre en Ukraine et ses conséquences pour la France". La Première ministre Elisabeth Borne ouvrira ce débat, qui place le début de la session parlementaire sous le sceau de cette actualité internationale brûlante.
La majorité compte interpeller les élus RN, qu'elle accuse régulièrement de proximité avec la Russie. "Sur l'Ukraine, on voit bien que les masques tombent", a pointé au Parisien dimanche la cheffe de file des députés Renaissance Aurore Bergé.
Les passes d'armes devraient reprendre de plus belle à partir de 21h30 sur le projet de loi portant "mesures d'urgence" en vue du "plein emploi", que porte le ministre du Travail Olivier Dussopt.
Au menu au Palais Bourbon jusqu'à mercredi, avec quelque 300 amendements à la clé, il prévoit dans un premier temps de prolonger les règles actuelles de l'assurance chômage. Issues d'une réforme chaudement contestée du premier quinquennat Macron, elles arrivent à échéance le 31 octobre.
Le projet de loi enclenche aussi la possibilité, par décret, de moduler l'assurance chômage afin qu'elle soit "plus stricte quand trop d'emplois sont non pourvus, plus généreuse quand le chômage est élevé", selon les mots d'Emmanuel Macron pendant la campagne présidentielle.
Après une phase de concertation d'ici quelques semaines avec les partenaires sociaux, le gouvernement décidera par décret de la forme que prendra cette modulation, pour une entrée en vigueur début 2023.
- Elargir la majorité -
L'exécutif martèle qu'il y a urgence face aux difficultés de recrutement, et fait de cette réforme l'une des conditions pour atteindre l'objectif de plein emploi en 2027, soit un taux de chômage d'environ 5% contre 7,4% actuellement.
Le régime actuel d'assurance chômage "n'est pas suffisamment incitatif au retour à l'emploi", a martelé M. Dussopt devant les députés en commission.
A l'unisson des syndicats, l'alliance de gauche Nupes répond que les difficultés de recrutement sont d'abord liées à la formation et à l'attractivité des métiers (salaires, conditions de travail...), et déplorent une "stigmatisation" des chômeurs.
"Nous bataillerons de pied ferme contre cette réforme inacceptable qui détourne la philosophie de l'assurance chômage et fait fi du +dialogue social+", ont annoncé ses chefs de file dans Libération.
Chez LR, l'accueil du projet de loi est meilleur, même si Thibault Bazin pense qu'il ne changera pas "la donne à court terme pour inciter à la reprise du travail".
Comme à l'été sur le paquet pouvoir d'achat, les voix de ces députés, ou a minima leur abstention, sont nécessaires afin que le texte soit adopté.
Le ministre a fait des ouvertures sur des propositions de la droite pour durcir l'accès à l'indemnisation au motif de l'"abandon de poste", ou simplifier la validation des acquis de l'expérience (VAE), notamment pour les proches aidants, autre volet du projet de loi. Un amendement gouvernemental prévoit de proposer à l'avenir un véritable "service public de la VAE".
Les élus RN ne feront pas l'appoint en voix: ils jugent les mesures lacunaires, en l'absence de prise en compte notamment de la jeunesse.
Pour une adoption définitive rapide, le projet de loi sera examiné par le Sénat dès le 25 octobre en première lecture.
Devant les deux chambres va s'engager en parallèle dans les prochains jours l'épreuve du budget 2023, que les oppositions promettent déjà de rejeter. L'exécutif risque fort de recourir à l'article 49.3 de la Constitution pour faire passer ce projet de budget sans vote.
La rentrée est "très chargée" mais "nous l'abordons de façon très sereine" et "sous le signe d'une nouvelle méthode" de recherche de compromis, a souligné à France 2 la présidente de l'Assemblée Yaël Braun-Pivet. Elle refuse d'envisager un "blocage" des réformes: "ce n'est pas ce que les électeurs ont souhaité".
P.Claes--JdB