

Automobile: les promesses électrisantes de la recharge ultra-rapide
Une recharge de voiture électrique aussi rapide qu'un plein d'essence ? C'est la promesse futuriste de marques comme le géant chinois de l'automobile BYD, mais le réseau de recharge pourrait tarder à s’adapter.
Ultra-rapide
BYD a dévoilé cette semaine un nouveau système de recharge permettant aux voitures de récupérer jusqu'à 470 kilomètres d'autonomie après avoir été branchées pendant seulement cinq minutes, soit quatre fois plus vite que les électriques les plus performantes du marché.
Cette annonce allie une voiture à l'architecture électrique avancée (appelée "Super e-Platform") à des bornes de recharge surpuissantes. Leur puissance en pic atteint 1.000 kilowatts (kW), soit la puissance nécessaire pour alimenter un village.
Elle place notamment BYD devant les Superchargers de son principal concurrent Tesla, qui a fait de son réseau de 60.00 bornes (dont 18.000 en Europe) un grand argument de vente.
Ces bornes doivent être déployées dès cette année dans des concessions BYD en Chine et arriveront "dans les prochaines années en Europe", où la marque a de grandes ambitions, a indiqué jeudi la vice-présidente de BYD Stella Li à l'AFP.
"C'est une révolution: la recharge des véhicules électriques devient aussi rapide que le passage à la station-essence", a promis Stella Li lors d'une interview à Paris.
Des milliers de bornes
Après un lent décollage, des milliers de bornes de recharge sont installées chaque mois à travers la Chine, l'Europe et l'Amérique du Nord.
Le nombre de bornes ultrarapides (plus de 150 kW) a quasiment doublé en Europe entre 2023 et 2024, selon les données de la Commission européenne.
Ces plus de 80.000 bornes commencent à percer dans le cœur des grandes villes après s'être installées sur les autoroutes et en périphérie.
La charge ultra-rapide rassure quant à l'autonomie de la voiture: c'est le deuxième souci des consommateurs après le prix des modèles électriques, selon Apostolos Petropoulos, expert à l'Agence internationale de l'énergie (AIE).
Accès limité
La plupart des voitures électriques en vente dans le monde du marché ne peuvent pas encaisser des recharges au-delà de 250 kW, prévient Shan Tomouk, analyste pour le cabinet britannique Rho Motion.
Les fabricants de bornes proposent déjà des chargeurs très rapides, pour les camions notamment. Le blocage vient plutôt des marques de voitures, qui veulent "préserver la durée de vie des batteries", car la charge ultra-rapide endommage leurs cellules, précise M. Tomouk.
L'annonce de BYD est cependant "remarquable" dans le contexte chinois, où très peu d'automobilistes ont des bornes à la maison et doivent donc se brancher dans la rue, souligne M. Tomouk.
En Europe, dans la plupart des cas, "les automobilistes rechargent à la maison, au travail ou dans la rue sur des chargeurs lents", explique Apostolos Petropoulos à l'AIE. A part sur les longs trajets, "on n'a pas tout le temps besoin de la recharge rapide, mais le fait qu'elle soit disponible encourage les consommateurs à passer à l'électrique".
Ces chères bornes
Les investissements dans les bornes restent très dépendants des subventions publiques: elles sont très chères à installer (environ un million d'euros par station) et difficilement rentables pour le moment.
"C'est le problème de l’œuf et de la poule", décrit l'expert de l'AIE. "Si vous n'avez pas de demande pour des recharges, vous n'allez pas investir. Et si vous n'avez pas l'infrastructure de recharge, les gens ne vont pas acheter de voitures électriques".
Réseau limité
L'état des réseaux électriques pourrait aussi compliquer le développement à grande échelle de ces bornes ultra-rapides: il faut les préparer à l'arrivée de ces goinfres en électricité.
Mais les réseaux ont déjà d'autres priorités, comme l'intégration des énergies renouvelables, ou l'interconnexion entre différents pays européens, souligne Apostolos Petropoulos.
A quel prix?
Recharger sur une borne ultrarapide coûte déjà bien plus cher qu'à la maison, dépassant parfois le coût de l'essence au kilomètre parcouru.
Les 1.000 kW de BYD marqueront-ils une nouvelle augmentation? "Je ne crois pas", a souligné Stella Li, notamment dans les pays comme la France où l'électricité est déjà "propre et moins chère".
En Europe, les prix de l'électricité pourraient baisser, notamment grâce aux énergies renouvelables, selon M. Petropoulos. Reste à voir comment cela se traduira dans le prix du kWh à la borne.
M.F.Schmitz--JdB