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Des dizaines de victimes de violences à Bétharram reçues par le procureur de Pau
Une soixantaine de victimes, uniquement des hommes, se sont rendues jeudi au palais de justice de Pau pour un temps d'échange avec le procureur de la République sur les violences physiques et sexuelles vécues à Notre-Dame-de-Bétharram (Pyrénées-Atlantiques).
"Je suis très ému de voir tous mes camarades derrière moi, on est tous éprouvés mais je suis très fier de toutes ces victimes à mes côtés pour ce combat", a indiqué à l'AFP le porte-parole du collectif des victimes, Alain Esquerre.
Plusieurs décennies après les faits, commis des années 1950 aux années 2000, le parquet de Pau a ouvert en février 2024 une enquête préliminaire à la suite du dépôt d'une vingtaine de plaintes d'anciens élèves de cet établissement catholique béarnais.
A ce jour, 152 plaintes, pour viols, violences physiques ou sexuelles, ont été déposées, dont 40 nouvelles présentées ce jeudi, selon M. Esquerre.
Vendredi dernier, une information judiciaire a été ouverte. Seul un homme, un ex-surveillant général de Bétharram, a été mis en examen pour viol et placé en détention provisoire.
Tous les autres visés par les plaintes, des prêtres ou des surveillants laïcs, sont soit morts soit protégés par la prescription.
L'un d'eux, né en 1955 et surnommé "Cheval" par les élèves en référence à sa chevalière qu'il utilisait pour les frapper, est cité dans de nombreux témoignages d'anciens élèves.
"On ne peut plus dire à des victimes +C'est prescrit+. Ce n'est plus suffisant parce qu'elles peuvent être amnésiques traumatiques et avoir une remontée de leur trauma à un moment où le dossier est prescrit", a lancé à la presse l'une des victimes, Pascal Gélie, avant de rencontrer le procureur.
Tout comme M. Esquerre qui avait qualifié ce dossier de "tentaculaire", il a exhorté "ceux qui sont isolés dans leur coin, qui revivent leurs traumas et qui sont terrifiés" à se joindre au collectif des victimes, qui sera "toujours là" pour eux.
Le porte-parole des victimes a annoncé qu'il allait insister auprès du procureur de Pau, Rodolphe Jarry, sur "l'importance d'inclure l'institution Bétharram dans l'information judiciaire, pour interroger les responsabilités de l'établissement", longtemps réservé aux garçons, avec son pensionnat connu dans toute la région pour ses méthodes autoritaires.
"C'est une institution de salopards. Point. Et le mot est faible", a tonné avant la rencontre Jean-Marie Delbos, 78 ans, victime d'un prêtre aujourd'hui nonagénaire qui avait été placé en garde-à-vue la semaine dernière mais a été relâché pour prescription.
"Il est à l'Ehpad maintenant, trois étoiles, quatre étoiles, cinq étoiles", ironise-t-il, soulignant qu'il n'attend plus rien, à part qu'il aille "en enfer".
D'autres collectifs d'anciens élèves disant avoir subi des violences physiques et sexuelles dans des établissements privés un peu partout en France ont fleuri sur les réseaux sociaux ces derniers jours.
M.Kohnen--JdB