Journal De Bruxelles - Loi narcotrafic: pour "changer de paradigme", le Sénat approuve la création d'un parquet spécialisé

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Loi narcotrafic: pour "changer de paradigme", le Sénat approuve la création d'un parquet spécialisé
Loi narcotrafic: pour "changer de paradigme", le Sénat approuve la création d'un parquet spécialisé / Photo: Bertrand GUAY - AFP

Loi narcotrafic: pour "changer de paradigme", le Sénat approuve la création d'un parquet spécialisé

Un parquet national anticriminalité organisée pour "changer de paradigme" et "réarmer" la France face au narcotrafic: le Sénat a adopté mardi la mesure-phare d'une proposition de loi transpartisane vivement soutenue par le gouvernement, en quête d'un "sursaut national" face aux trafiquants de drogue.

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Érigé comme "priorité absolue" du gouvernement par Gérald Darmanin, et comme "menace existentielle" par Bruno Retailleau, le trafic de drogue est au cœur des discussions de la chambre haute jusqu'à mercredi, avec l'examen du texte des sénateurs Étienne Blanc (Les Républicains) et Jérôme Durain (Parti socialiste).

Dans un climat consensuel rarissime sur les sujets régaliens au Parlement, les sénateurs ont approuvé très largement une refonte de l'architecture judiciaire et policière de la lutte contre la criminalité organisée, actant la création d'un parquet national anticriminalité organisée, dénommé Pnaco.

"Un pas historique et décisif dans la lutte contre le narcotrafic a été accompli", a réagi sur X le ministre de la Justice Gérald Darmanin, qui espère voir le Pnaco opérationnel en janvier 2026.

Il a affirmé que ce futur parquet serait mis en place "par défaut à Paris", mais qu'il "pourrait être ailleurs", évoquant notamment Marseille, ville particulièrement ciblée par le trafic de stupéfiants.

- "Boîte à outils" -

Ce parquet spécialisé, similaire aux parquets financier (PNF) ou antiterroriste (Pnat), serait chargé des crimes les plus graves et constituerait une véritable "incarnation" de la lutte contre le narcotrafic, avec un rôle de coordination des parquets.

Il s'appuierait sur des services d'enquête renforcés: un "état-major criminalité organisée" (EMCO) défendu par le ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau. Institué par voie réglementaire, cette structure aurait pour ambition de constituer le "bras armé" de la lutte contre la criminalité organisée.

"Devant la submersion (du narcotrafic), un changement de paradigme complet est possible", a plaidé Gérald Darmanin. À ses côtés, le ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau a appelé à un "sursaut national" dans un "combat vital", saluant également la "volonté transversale" perceptible au Parlement sur ce dossier.

La proposition de loi du Sénat, au titre évocateur - "sortir la France du piège du narcotrafic" - aborde par ailleurs la question de l'immunité des repentis, la procédure pénale ou encore la lutte contre le blanchiment d'argent. Une "boîte à outils" pour policiers, magistrats, gendarmes et autres douaniers.

Un vote solennel est prévu mardi 4 février au Palais du Luxembourg, puis l'Assemblée nationale s'en saisira, potentiellement durant la semaine du 17 mars.

- Prévention en question -

Le texte propose également la création d'une procédure "d'injonction pour richesse inexpliquée" pour obliger les suspects à s'expliquer sur leur train de vie, ou encore d'une nouvelle infraction "d'appartenance à une organisation criminelle". Autre idée: un mécanisme de gel administratif des avoirs des narcotrafiquants, pour les "frapper au portefeuille".

Avec une ambition: "Trouver des solutions pour que nos institutions reprennent l'ascendant face aux trafiquants", a martelé Jérôme Durain.

Certaines mesures sont plus irritantes, comme l'idée de créer un procès-verbal distinct - ou "dossier-coffre" - pour ne pas divulguer à la défense certaines techniques d'enquête sensibles ; ou la possibilité accordée aux préfets de prononcer des "interdictions de paraître" sur les points de deal.

Certains élus, comme plusieurs associations, ont soulevé leurs craintes face à "une atteinte aux libertés individuelles et au droit de la défense", quand d'autres ont regretté que le texte laisse de côté le volet de la prévention et de la santé publique...

Un choix assumé par les auteurs et le gouvernement, pour qui l'urgence est d'abord "répressive".

Les débats ont néanmoins brièvement dérivé sur l'épineuse question de la dépénalisation de l'usage de drogues, mais également sur l'absence de financement nécessaire à la restructuration de l'arsenal répressif prônée par ce texte.

"Ce texte contient des mesures attendues, des avancées certaines. Mais seules et sans moyens, elles ne permettront pas de déjouer le piège du narcotrafic", a regretté l'écologiste Guy Benarroche.

R.Vandevelde--JdB