La Guadeloupe toujours sans électricité, le préfet annonce un couvre-feu
La "coupure généralisée d'électricité" qui affecte depuis vendredi matin toute la Guadeloupe est toujours en cours, a déclaré le préfet, qui a décrété un couvre-feu pour la nuit de vendredi à samedi, à partir de 19H00 heure locale (23H00 GMT).
"Afin de prévenir le risque de troubles à l'ordre public dans le contexte de la coupure généralisée d'électricité, le préfet décide la mise en place d'un couvre-feu généralisé" sur l'ensemble du territoire, de 19H00 à 06H00, a indiqué, dans un communiqué, la préfecture de la Guadeloupe.
Cette coupure ne sera pas résorbée avant plusieurs heures, la réinitialisation du réseau n'étant "toujours pas effective" à 16H00 heure locale, selon le préfet.
"Le retour à la normale ne sera effectif que dans un délai de 4 heures à compter de la réinitialisation du réseau électrique", a prévenu le préfet, qui a réquisitionné des salariés nécessaires au fonctionnement de la centrale fournissant en électricité la quasi-totalité de l'archipel.
Quelques heures plus tôt, il avait accusé "des salariés grévistes" de s'être introduits à 08H30 dans la salle des commandes et d'avoir "provoqué l'arrêt d'urgence de l'ensemble des moteurs" de la centrale Jarry.
D'autres sites fournissant de l'électricité ont été impactés, selon le préfet Xavier Lefort, qui a dénoncé sur la chaîne Guadeloupe la 1ère un "sabotage".
Un conflit social oppose depuis plusieurs semaines la branche énergie de la CGT et la direction d'EDF Production électrique insulaire (PEI) dans ce territoire des Antilles françaises de près de 380.000 habitants.
En Guadeloupe, l'annonce de cette coupure généralisée a provoqué une certaine inquiétude concernant notamment la distribution de l'eau et le fonctionnement de l'hôpital.
"Les réseaux de téléphonie mobile sont en mode très dégradé", a signalé la préfecture, évoquant une interruption de la distribution d'eau dans plusieurs communes, touchant "30% de la population globale dont 80% de la Grande Terre".
- "Autonomie de 72 heures" -
Au Centre Hospitalier de la Guadeloupe (CHUG), "les équipes de maintenance ont activé les groupes électrogènes sur l'ensemble des sites concernés", a indiqué l'hôpital dans un communiqué.
"Les unités critiques de l'hôpital disposent d'une autonomie de 72 heures", a poursuivi le CHUG.
"La matinée, ça a tenu mais à partir de 12h-13h on a su qu'un des générateurs avait planté et il n'y avait pas d'électricité au niveau de la psychiatrie, la direction des soins infirmiers, les affaires médicales", a assuré à l'AFP un médecin de l'établissement, sous couvert d'anonymat.
Dans un supermarché du Gosier, près de Pointe-à-Pitre, des habitants poussaient des chariots avec plusieurs packs d'eau et certaines marques manquaient déjà dans les rayons, mais rien de comparable aux instants qui précèdent l'arrivée d'un ouragan, a constaté une correspondante de l'AFP.
A Jarry, poumon économique de l'archipel, certaines enseignes commençaient à fermer, a constaté une autre correspondante.
La situation est compliquée pour Léon Prosper Jimmy, ambulancier près de Pointe-à-Pitre, "lors de la prise en charge chez le patient ou lors du retour à domicile pour ceux qui habitent en immeuble où il y a un ascenseur", explique-t-il.
Il faut donc les transporter dans les escaliers, "à bras d'hommes, on se relaie, on appelle des collègues en renfort", poursuit l'homme de 41 ans. .
"Il est possible que les lignes téléphoniques des sapeurs-pompiers soient temporairement inaccessibles pour certains usagers", a aussi fait savoir la préfecture de Guadeloupe.
"Ce sont près de 230.000 foyers qui sont impactés par cette coupure", a écrit un peu plus tôt sur X Olga Givernet, ministre déléguée chargée de l'Energie.
L'opération pour rétablir l'électricité est "complexe", a expliqué de son côté Marie-Line Bassette, directrice d'EDF Archipel Guadeloupe, sur Guadeloupe La 1ère, assurant que cela serait "très progressif".
Le mouvement social, qui dure depuis le 15 septembre, porte sur la mise en œuvre d'un accord signé début 2023, après deux mois de grève des mêmes agents, qui réclamaient une mise en conformité de leurs contrats et de leur rémunération avec le droit du travail, notamment cinq ans d'arriérés de salaires non versés.
Il avait depuis provoqué des coupures d'électricité affectant jusqu'à environ 100.000 foyers.
Lundi dernier, la direction d'EDF PEI avait proposé la signature d'un accord que la fédération de l'énergie de la CGT Guadeloupe a refusé, un dernier point d'achoppement portant sur le mode de calcul des congés payés.
La Guadeloupe est une zone non interconnectée, ce qui signifie qu'elle doit produire elle-même son électricité pour satisfaire la demande sur le territoire. Sa production électrique dépend à près de 70% de l'énergie thermique: du fioul pour EDF et des granulés de bois pour la société Albioma qui fonctionnait encore au charbon jusqu'en juillet.
R.Vandevelde--JdB