

Parquet spécialisé, outils répressifs... Les mesures phares de la loi narcotrafic
Parquet spécialisé, nouveau régime carcéral d'isolement, mesures répressives et outils pour les enquêteurs... La dernière version de la proposition de loi contre le narcotrafic, fruit d'un accord parlementaire trouvé jeudi, semble promise à une adoption confortable malgré plusieurs irritants pour la gauche.
- Parquet spécialisé -
Au cœur de la proposition de loi, la création d'un parquet national anticriminalité organisée (Pnaco), relativement consensuelle, qui devrait voir le jour en janvier 2026.
Sur le modèle des parquets financier (PNF) et antiterroriste (Pnat), le Pnaco serait saisi des crimes les plus graves et complexes.
- Nouveau régime carcéral d'isolement -
Le texte prévoit de créer des quartiers de haute sécurité dans les prisons, où seraient affectés les trafiquants les plus dangereux, sur décision du garde des Sceaux, après avis du juge de l'application des peines pour une personne condamnée.
L'affectation à ces quartiers fera l'objet d'un réexamen périodique après un an, selon le texte définitif. L'Assemblée avait opté pour un délai plus long, de deux ans.
Ce régime, inspiré des lois italiennes antimafia, prévoit des fouilles intégrales encadrées en cas de contacts sans surveillance d'un agent, ou encore un accès restreint au téléphone.
- Dossier-coffre -
Décriée par la gauche et les avocats, mais défendue par le gouvernement: la création lors des enquêtes d'un procès-verbal distinct, ou dossier-coffre, pour ne pas divulguer certaines informations aux trafiquants et à leurs avocats.
La date, l'heure, le lieu d'utilisation de techniques spéciales d'enquête (sonorisation, captation des données informatiques...) seraient inscrits dans un PV distinct.
Après avis du Conseil d'Etat, le dispositif a été restreint aux cas de nature à mettre en danger la vie ou l'intégrité physique d'une personne.
Les éléments recueillis ne pourraient pas être utilisés pour une condamnation sans que le PV distinct soit révélé. Sauf si ces éléments sont absolument nécessaires "à la manifestation de la vérité".
- Renseignement algorithmique -
Le texte prévoit une expérimentation pour recourir au renseignement algorithmique, technique déjà autorisée pour la prévention du terrorisme et des ingérences étrangères.
Elle vise à permettre l'analyse d'un volume très important de données à l'aide d'un algorithme, dans le but de produire des alertes révélant possiblement une menace. Une mesure contestée par une partie de la gauche.
En revanche, le dispositif décrié qui visait à contraindre les services de messagerie chiffrée (Signal, WhatsApp...) à communiquer les correspondances des trafiquants aux services de renseignement n'a pas été réintroduit dans le texte.
- Surveillance à distance -
Autre mesure technologique: la possibilité, dans le cadre d'une enquête, d'activer à distance un appareil électronique, à l'insu de son propriétaire, afin de procéder par exemple à des écoutes.
Une telle technique ne pourrait concerner les appareils mobiles d'un député, sénateur, magistrat, avocat, journaliste ou médecin.
- Repentis -
Les parlementaires ont voté pour un régime plus attractif du régime des repentis, personnes impliquées dans des réseaux mais collaborant avec la justice.
Avec le nouveau dispositif, elles pourraient voir leur peine réduite jusqu'aux deux tiers de la peine initiale.
- Infiltrés civils -
Les parlementaires ont acté la création d'un statut d'"infiltrés civils", ces informateurs rémunérés qui pourraient, sous conditions strictes, être autorisés par le futur Pnaco à infiltrer les réseaux.
Mais ces infiltrés devront s'inscrire dans un "parcours de sortie de la délinquance" établi par une convention avec le Pnaco, avec interdiction de commettre toute violence volontaire.
Ces informateurs seront dûment contrôlés après leur infiltration, pendant dix années durant lesquelles le moindre crime ou délit commis réactivera les peines précédemment encourues.
- Interdiction de paraître -
Les préfets pourraient prononcer une interdiction de paraître d'un mois maximum dans les lieux liés à des activités de trafic de stupéfiants pour les personnes y participant.
Le préfet pourrait aussi saisir un juge pour faire expulser de son logement toute personne dont les agissements en lien avec des activités de trafic de stupéfiants troublent l'ordre public.
- Fermetures de commerces -
Le texte permet aux préfets de décider la fermeture administrative de commerces soupçonnés de blanchiment, pour une durée allant jusqu'à six mois, éventuellement prolongée six mois par le ministre de l'Intérieur.
Un mesure voulue par le Rassemblement national, permettant aux maires de procéder à de telles fermetures administratives, a finalement été retirée du texte.
W.Wouters--JdB