Laurent Ulrich, un archevêque expérimenté à la tête du diocèse de Paris
Laurent Ulrich, 70 ans, a été nommé mardi au poste sensible d'archevêque de Paris, où ce prélat expérimenté aura pour tâche d'apaiser un diocèse réputé difficile à gouverner et encore marqué par la démission de son prédécesseur.
Le pape François a désigné l'actuel archevêque de Lille, à ce poste depuis 2008, pour succéder à Michel Aupetit, après sa démission, acceptée début décembre. Ce dernier était contesté pour sa gestion des ressources humaines, et plusieurs journaux lui avaient prêté une relation amoureuse avec une femme qu'il avait catégoriquement démentie.
"Je ne m'y attendais pas du tout", a déclaré son successeur dans une vidéo publiée par le diocèse de Paris, indiquant avoir eu une première réaction de "crainte" face à la difficulté de la tâche.
Archevêque de Lille depuis 2008, Mgr Ulrich présente un profil modéré au sein de l'épiscopat catholique, qui épouse sans réticence les orientations du pape François.
Impliqué dans la cause des migrants, il avait notamment organisé un temps de prières à Dunkerque en hommage aux 27 migrants morts noyés en Manche en tentant de rallier les côtes anglaises en novembre dernier.
Laurent Ulrich a "une fibre sociale réelle", souligne une source connaissant bien le milieu. A Lille, un diocèse marqué par la grande pauvreté, il a travaillé avec les différentes associations. En décembre 2018, il avait appelé à l'apaisement dans la crise des "gilets jaunes".
Natif de Dijon, détenteur d'une double maîtrise de philosophie et de théologie, il est ordonné prêtre en 1979 pour le diocèse de Lyon, où il devient vicaire épiscopal puis vicaire général. En 2000, il est nommé évêque de Chambéry. Il a été un des deux vice-présidents de la Conférence des évêques de France entre 2007 et 2013.
C'est la première fois depuis plus de 40 ans que le siège d'archevêque de Paris échappe à un ancien prêtre de ce diocèse, mettant un terme à l'ère inaugurée en 1981 par Jean-Marie Lustiger.
- Archevêque de la réouverture de Notre-Dame -
Le nouvel archevêque devra s'attaquer en priorité à apaiser et restaurer l'unité au sein des prêtres parisiens.
Après le "débarquement" d'Aupetit, le diocèse ressemble à un "chaudron", avec des "clans", commente une source fine connaisseuse. Mais il ne disposera pour cela que des cinq années devant lui avant sa retraite (fixée à 75 ans par le droit de l'Eglise).
Le diocèse de Paris est le plus important de France, avec plus de 500 prêtres en activité, une centaine de paroisses, des laïcs salariés ou bénévoles engagés dans divers mouvements et missions (SDF, migrants...).
Celui qui ambitionnait simplement "d'être le curé de la cathédrale de Dijon", comme il l'a assuré à RCF Hauts-de-France, devra occuper pleinement le poste d'archevêque de la capitale, siège exposé et tribune stratégique pour l'Eglise de France, alors qu'il est reproché à son prédécesseur un relatif effacement sur ce plan.
Comme le président de la Conférence des évêques de France (CEF) - actuellement Eric de Moulins-Beaufort - il sera celui qui incarne le premier culte français auprès des autorités politiques, de la société civile et des médias.
"La foi catholique, l'Eglise catholique, n'est plus dans la position de dominer le monde et de dire à tout le monde ce qu'il faut", déclare-t-il toutefois sur la radio catholique.
Autre dossier à surveiller, comme dans tous les diocèses: celui des agressions sexuelles commises par des prêtres, quelques mois après la remise du rapport choc de la commission Sauvé. A Lille, Laurent Ulrich a mis en place, comme ailleurs, une cellule d'écoute, reçu des victimes, mais aussi organisé des temps d'échanges entre responsables religieux et laïcs.
Enfin, le nouvel archevêque aura à gérer la poursuite du chantier de restauration de la cathédrale Notre-Dame de Paris, gravement endommagée par un incendie il y a trois ans. Ce, en dialogue avec l'Etat, et sous le regard attentif des fidèles et des nombreux donateurs. Le monument doit être rendu au culte pour avril 2024.
"Mon ministère à Paris va être un ministère qui veut manifester l'amitié du Christ", a assuré Laurent Ulrich.
Son installation à Paris aura le 23 mai en l'église Saint-Sulpice.
M.F.Schmitz--JdB